mercredi 16 juin 2010

Où en est le vélo urbain ? - Dumoulin Bicyclettes


Opus Nuovella
photo : Alec

Voici la première d'une série d'entrevues d'intervenants dans le domaine du vélo urbain à Montréal.

Jean Lecompte
et Étienne Roy-Corbeil sont les jeunes propriétaires de Dumoulin Bicyclettes. Ayant travaillé tous deux dans cette boutique durant des années, ils décident d'unir leurs efforts et de racheter le magasin en 2005. Ils remanient l'orientation de la boutique en se spécialisant en vélos urbains, et particulièrement en vélos pliants.

Nous leur avons posé les mêmes questions qu'aux autres détaillants de la métropole afin d'avoir une vue d'ensemble du vélo urbain.

Q : Selon vous, où en est le vélo urbain?

R : Jean : Attend un peu, je vais dehors pour répondre, plus inspirant que mon bureau sans fenêtre...
D'un point de vue strictement local, je constate que Montréal est sur la bonne voie en ce qui concerne le vélo, particulièrement le vélo urbain. Plus d'aménagements cyclables, plus de vélos dans les rues, c'est beau à voir. Par contre, on est loin d'avoir atteint un niveau satisfaisant. Trop de gens se déplacent en auto. Si je me rappelle correctement les statistiques, environ 50% des déplacements faits en auto ont moins de 8 km. 8 km à vélo, c'est 20 minutes, ou 30 si on prend ça relax. Dans cette optique, facile de réduire son utilisation de la voiture. Pour la banlieue, je connais peu ce marché, mais j'ai de forts doutes quant à l'utilisation d'un vélo au quotidien. Là, je ne parle pas de rouler le dimanche quand il fait beau, je parle d'utiliser le vélo comme moyen de transport primaire.
Au niveau des infrastructures, j'aimerais penser que le vélo ne demande rien d'autre que lui-même, mais force est de constater que d'avoir certaines infrastructures facilite les choses. Par exemple, êtes-vous allé au Marché Central? À peu près rien n'est conçu pour les vélos. Pour aller dans un grand magasin tel Future Shop, on doit chercher un chemin sécuritaire (avoir des enfants, je serais inquiets de les savoir aller là-bas!), on doit trouver, souvent sans succès, un endroit adéquat pour barrer notre vélo. On me répond que peu de cyclistes fréquentent cet endroit. Peut-être, mais avec l'aménagement qui a été fait, ce n'est pas surprenant!
Donc beaucoup de chemin a été fait, merci entre autres à Claire Morissette et Robert Silverman du Monde à Bicyclette, mais beaucoup de chemin reste à faire.

Q : À quoi ressemble le cycliste urbain?

R : Disons à quelqu'un qui arrive au travail en forme, réveillé, qui n'a pas besoin de perdre son temps en face d'un miroir dans un gym à se regarder courir sur un tapis roulant, qui peut se permettre de travailler 4 jours/sem s’il le désire, car il n'a pas à investir (non, mauvais terme, à dépenser) 5000-6000$/an pour une voiture, pour qui son temps de trajet n'est pas proportionnel au trafic rencontré.
En fait, je crois que le cycliste urbain est celui qui est convaincu de la logique et de la pertinence de son moyen de locomotion.

Q : D'un point de vue culturel, à quoi ressemble le cycliste urbain?

R : ?

Q : Y a-t-il des catégories de cyclistes urbains?

R : Oui, qui sont, je dirais, proportionnelles à l'utilisation du vélo. Donc les convaincus, faisant du vélo 365 jours/année, ceux que seule la neige arrête, et finalement ceux qui sont découragés à la première pluie. Il est à noter que j'admire tous ceux utilisant le vélo comme moyen de transport, peu importe la raison, peu importe dans quelle catégorie ils sont. L'important est avant tout de s'amuser et d'être à l'aise. Alors si on aime davantage prendre le métro, c'est tout aussi correct, mais il faut avoir essayé au préalable le vélo pendant quelques mois par contre!!!

Q : Quelles sont les préoccupations premières du cycliste urbain?

R : Avoir du plaisir!
Sérieusement, c'est le vol de vélo.

Q : Quelles sont ses appréhensions face à la pratique du vélo en ville?

R : Comment les voitures vont se comporter autour de nous, les accidents. Personnellement, je n'ai que très rarement des problèmes avec les automobilistes.
On entend aussi souvent des gens qui ne veulent pas avoir chaud avant d'arriver au travail. Muni d'une sacoche, on peut tout simplement y déposer son chandail quand on commence à suer. Je vais à l'école à vélo (7 km) et je n'ai aucun problème de ce type. Quand il pleut beaucoup, j'y vais à métro, je suis paresseux et ne veux pas traîner manteau, pantalon, etc...

Q : Les médias font souvent référence au nombre de vols de vélos en ville. Selon vous qui vivez sur le terrain, les probabilités sont-elles si élevées?

R : Oui! Mais assez facile à diminuer radicalement. C'est pas compliqué, pour garder son vélo, il faut un New York lock, un Abus série Granite, ou un équivalent. Je ne connais quasi personne s'étant fait voler un vélo avec un cadenas de cette qualité. On n’a pas la mentalité de payer 100$ + pour un cadenas, mais il faut ce qu'il faut. J'ai un vélo de plus de 1000$ continuellement barré à l'extérieur et je dors sur mes 2 oreilles. Une à la fois en fait.

Q : Que conseillez-vous au cycliste afin de bien protéger son vélo?

R : Voir plus haut! Aussi les Pin-Head, cette sorte de déblocage rapide qui a besoin d'une clé. Votre selle + 2 roues + fourche resteront où elles sont!

Q : Il y a des villes mythiques pour le cyclisme urbain, tel qu'Amsterdam, Copenhague, Tucson, Portland. Montréal peut-elle devenir une ville de vélo?

R : Même avec un aménagement adéquat, il y a un facteur qui prendra encore plus de temps à changer : les automobilistes. On se déplace de 150 km, soit Trois-Rivières, et il y a déjà une bonne différence de comportement sur la route. La courtoisie peut être longue à apprendre... (mais je dois avouer que ça fonctionne dans les 2 sens, les cyclistes, y compris moi, ne suivent pas tellement les règles de la route. Probablement qu'on choquerait moins les automobilistes si nous modifions aussi notre conduite!)

Q : Le vélo libre-service est-il un atout ou un handicape pour un magasin de vélo?

R : Ça dépend du marché. Si un magasin vit de la location de vélo, il doit probablement être furieux contre les Bixi, mais nous voyons d'un bon oeil ce système de vélo libre-service. En plus de ne pas trop affecter les ventes de vélo neuf, il met plus de vélo sur les routes, ainsi que dans les médias, ce qui est parfait! En plus, il dépanne quand notre vélo est en réparation ou à la sortie d'un bar quand on veut prendre l'air :-)


Dumoulin bicyclette
651 villeray E., Montréal, H2R 1H9
514 272-5834
www.dumoulinbicyclettes.com
info@dumoulinbicylettes.com

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